Cour d’Appel de Liège, 26 mars 1997

26 Mars 1997
Domaine d'action: Autres domaines
Critère de discrimination: Racisme
Arrondissement judiciaire: Liège
Juridiction: Cour d’appel

Article 1 et 3 de la loi de 30 juillet 1981.

Certains membres du " Parti des Forces Nouvelles " sont poursuivis sur la base des articles 1 et 3 de la loi du 30 juillet 1981.

76 personnes physiques belges et étrangères, dont plusieurs personnalités politiques, et deux asbl ont porté plainte. Le programme de ce parti pour les élections communales du 9 octobre 1988 comportait une série de principes discriminatoires vis-à-vis des étrangers non-européens, comme la suppression des allocations et des autres avantages sociaux pour les étrangers non-européens, la non-prolongation de leur permis de travail, l'opposition à toute forme d'octroi du droit de vote aux étrangers.

1) La Chambre des Mises en Accusation (voir Chambre des Mises en Accusation de Liège, 28 mars 1991) a jugé, contre l'avis du Ministère public, que la liberté d'expression, quel que soit son contenu, devait respecter le cadre légal prévu par l'article 19 de la Constitution. Le tribunal considère par ailleurs que l'organe du parti a régulièrement prôné des opinions qui pourraient relever de la loi du 30 juillet 1981 et décide dès lors de renvoyer les accusés devant le tribunal correctionnel.

Il convient de relever que, dans cette affaire, la Chambre des Mises en Accusation retient la violation de l'article 3 de la loi et juge que les activités des prévenus ne consistaient pas à faire connaître leurs opinions par voie de presse, mais qu'ils voulaient assurer la promotion du parti qu'ils soutenaient ou pour lequel ils étaient candidats. Par conséquent, ces faits ne sont pas constitutifs d'un délit de presse.

2) Tribunal correctionnel de Liège, 22 juin 1993: L'une des affiches diffusées pendant la campagne électorale s'intitulait " Retour au pays " et montrait un couple d'origine maghrébine, dont la femme porte une sacoche marquée CPAS tandis que son compagnon a, sur l'épaule, un sac où sont inscrites les destinations KINSHASA, MARAKECH, ALGER. Le tribunal estime que ceci témoigne d'un caractère outrancier et méchant et constitue " une incitation à la discrimination raciale visant non des individus comme tels mais bien en raison de leur appartenance à une ethnie particulière ".

3) La Cour d'appel de Liège commence par récuser l'exception d'incompétence fondée sur la qualification de délit de presse et sur l'article 150 de la Constitution. La Cour estime que les écrits soumis par les plaignants ne suffisent pas pour invoquer la compétence de la Cour d'assises et considère que " tant le PFN que AGIR, comme tout parti politique, n'ont pas essentiellement pour objet de recourir à des publications pour promouvoir leurs positions, cet aspect de leurs activités n'étant qu'un des moyens utilisés à cette fin ". Le fait que les tracts et les affiches discriminatoires aient été diffusés pendant la campagne électorale ne peut pas servir d'excuse étant donné que l'objectif du législateur (éviter à la société un climat de haine) est une préoccupation générale et permanente.

En ce qui concerne l'appartenance des personnes poursuivies au groupement en question, le tribunal a jugé " qu'il va de soi que l'inscription sur une liste électorale (...) portée à la connaissance de tous, indépendamment même de toute adhésion plus formelle ou l'exercice de responsabilités au sein du parti, implique la souscription aux positions adoptées par celui-ci, surtout lorsqu'elles prennent la forme d'affiches ou de tracts abondamment répandus ".

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