‘Diminution de l’immigration, restriction des droits fondamentaux des étrangers’

25 Juin 2014

Le Centre fédéral Migration présente son ‘Rapport annuel Migration 2013’

Après trois décennies d’augmentation des immigrations internationales vers la Belgique, notre pays a enregistré en 2012 une diminution d’environ 10% du nombre de migrants qui est passé de 138.071 en 2011 à 124.717 en 2012. C’est un des constats marquants du ‘Rapport annuel Migration 2013’ présenté aujourd’hui par le Centre fédéral Migration. « Cette diminution s’observe au niveau des immigrations de citoyens originaires de pays tiers (hors UE) », précise Patrick Charlier, directeur adjoint du Centre. L’immigration de citoyens originaires de l’Union européenne continue pour sa part à augmenter. En 2012, leur part représentait 63 % des flux d’immigration en Belgique. « Rien ne permet aujourd’hui d’affirmer que cette amorce d’une tendance à la baisse se confirmera dans les années à venir. »

Le nombre de visas accordés par la Belgique à des ressortissants de pays tiers pour regroupement familial est également en baisse : ce nombre a chuté de 30% de 2011 à 2012, et encore diminué de 5% de 2012 à 2013. Pendant cette période, la Belgique a également enregistré une baisse de 25% du nombre de demandeurs d’asile, et de 60% du nombre de personnes régularisées.

« Mais les chiffres ne disent pas tout », souligne Patrick Charlier. « Le Centre fédéral Migration observe en effet que cette diminution des chiffres va de pair avec une restriction des droits fondamentaux des étrangers. De nombreuses réformes et mesures ont contribué à cette situation. Citons pour commencer la série de réformes lancées entre 2011 et 2013 en matière migratoire. Celles-ci ont fortement affecté le droit de vivre en famille, et ont eu des conséquences sur les régularisations médicales et le code de la nationalité. Les conditions imposées pour pouvoir séjourner dans notre pays se sont ainsi vues considérablement durcies. »

« À côté de cela, les autorités ont pris, dans le cadre de la crise économique, des mesures affectant des catégories spécifiques d’étrangers : des citoyens européens, des personnes régularisées sur base de leur travail, des personnes qui ont introduit un recours contre une décision de refus ou de retrait de droit de séjour. Ces mesures restreignent l’accès à différents services sociaux et menacent – au moins indirectement – leur droit de mener une vie conforme à la dignité humaine. Nous pensons aussi ici à des initiatives locales, comme la contribution de 250 euros que la ville d’Anvers et d’autres communes souhaitaient prélever lors de l’inscription d’un étranger dans les registres communaux. »

Enfin, la Belgique est prise en défaut en matière de procédures. Patrick Charlier donne l’exemple d’une nouvelle condamnation de la Belgique au niveau international : « En 2013, notre pays a été condamné par la Cour européenne des droits de l’Homme par rapport à la situation d’un migrant sur le point d’être expulsé et confronté pour l’introduction d’un recours à une procédure extrêmement complexe. La CEDH a considéré le manque de garanties aux étrangers. Malgré ses récentes modifications, la procédure de recours et plus spécifiquement de recours en extrême urgence reste notre talon d’Achille. Il est urgent de revoir ces procédures. »

Pour Patrick Charlier, « le fait qu’une partie de ces réformes et mesures soient liées au contexte de crise économique ne décharge pas les autorités belges de leur de leur obligation de respecter et protéger les droits fondamentaux de chacun, obligation à laquelle elles sont liées par des engagements au niveau international. Qu’il s’agisse d’une politique menée à l’égard d’étrangers ne change rien à cet égard. »

Voilà pourquoi le Centre recommande l’introduction systématique de mesures d’impact des politiques migratoires sur les droits fondamentaux des étrangers. Et cela dans tous les domaines de la sphère politique. La Belgique compte nombre d’acteurs des droits de l’Homme compétents pour ce faire. Nous espérons que les pouvoirs publics et en particulier le futur gouvernement fédéral n’hésiteront pas à faire appel à eux.

Vers le rapport Migration.

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Photo France Dubois